Reine Dibussi, autrice : « La bande dessinée peut corriger. Elle peut guérir et surtout faire rêver »

Portrait de Reine Dibussi © DR

Autrice, dessinatrice et éditrice de bandes dessinées, la franco-camerounaise Reine Dibussi est devenue en quelques années une figure de proue de l’afroféminisme dans le neuvième art grâce à ses publications et projets novateurs. Dans ceux-ci, elle propose adroitement des représentations variées et davantage respectueuses des personnes noires, longtemps portraiturées avec des stéréotypes importuns dans la bande dessinée… Entretien avec Reine Dibussi.

Pour débuter, je vous demande une biographie. Quel est votre parcours ?

Reine Dibussi : J’ai commencé par des études en littérature et langues. Ensuite, j’ai fait une école d’art en illustration et bandes dessinées. En 2017, j’ai publié en autoédition le premier tome de la bande dessinée Mulatako. Le deuxième tome est sorti en 2021, celui-ci a été réalisé en collaboration avec Carine Bahanag au scénario. Nous travaillons toujours sur le reste de la série qui est prévue en quatre tomes. En tant qu’illustratrice, j’ai travaillé pour différents médias comme la revue La déferlante et Google lors de la Coupe du monde féminine de football en 2019. En 2023, j’ai illustré plusieurs chapitres de La cerise dans le labo, un livre collectif centré sur le parcours de femmes scientifiques en France. Depuis décembre 2023, je publie sur webtoon une bande dessinée saphique avec des personnages queers noirs. La bande dessinée s’appelle Cindy et Zoa – Joueuses, c’est un projet personnel. Avec l’autrice Laura Nsafou, nous avons publié une bande dessinée nommée Quand vient l’été. Je ne saurais terminer sans citer Afiri studio, la maison d’édition que j’ai cofondé avec Carine Bahanag. C’est une maison d’édition et un studio graphique qui forme, édite et accompagne de jeunes autrices et auteurs noirs.

Qu’est-ce qui vous a décidé à vous lancer dans l’écriture et l’illustration de bandes dessinées ?

Reine Dibussi : Le texte illustré a toujours été pour moi un moyen d’expression. Enfant, je lisais beaucoup de bandes dessinées. Lorsque j’ai commencé à raconter des histoires, je le faisais principalement en dessinant, en mettant des bulles, en faisant avancer l’histoire scène par scène comme j’avais pu le voir dans les bandes dessinées et dans les séries télévisées.

Comment vos débuts se sont-ils déroulés dans le monde de la bande dessinée professionnelle ?

Reine Dibussi : Mes débuts se sont faits dans le monde de l’autoédition. Ce choix de l’autoédition s’est imposé à moi en tant qu’autrice noire, qui voulait publier sur des sujets centrés sur l’africanité, avec notamment des personnages noirs. Ce n’est d’ailleurs que depuis récemment qu’on commence à voir émerger une petite place pour ce type de contenu, qui était souvent fait par des personnes non-noires. Parce que quand les personnes noires essayaient de travailler sur ce genre de sujet, elles passaient pour des communautaristes. C’était donc difficile d’intégrer le mieux éditorial français, voire francophone avec ce type de sujets liés aux corps et aux imaginaires noirs. Dans mon cas, ça s’est fait par l’autopublication, avec le soutien et l’accompagnement d’autres autrices comme Joëlle Épée Mandengue. C’est grâce à leurs encouragements que j’ai tenu à aller au bout de Mulatako, une série en cours de publication.

C’est-à-dire que vous vous êtes heurtée à des refus éditoriaux ?

Reine Dibussi : Le fait de recevoir des réponses négatives pour des projets éditoriaux n’est en rien exceptionnelle dans la bande dessinée. C’est une culture où il y a très peu d’élus. C’est pour cela qu’il faut créer ses propres opportunités. La bande dessinée indépendante a de la valeur et moi, en tant que formatrice et éditrice, mon positionnement, c’est d’accompagner les autrices et les auteurs noirs, de les mettre dans des conditions de travail pour pouvoir proposer des projets qui seront un peu plus visibles sur le marché éditorial français et francophone. C’est cela notre démarche à Afiri Studio. Nous ne disons pas aux auteurs et aux autrices de ne pas postuler à des postes, ni de ne plus envoyer leurs dossiers aux maisons d’édition. C’est plutôt : voici les meilleures armes pour vous préparer. Je n’ai d’ailleurs pas un discours fermé sur les maisons d’édition. Je suis dans une position où je sais qu’il y aura de la pédagogie à faire de notre part, qu’on le veuille ou non.

Vous parlez de la difficulté des autrices et auteurs noirs à publier des récits mettant en scène des personnages noirs en France. Comment expliquez-vous cette situation avec notamment le succès critique et commercial des différentes séries créées par l’autrice ivoirienne Marguerite Abouet ?

Reine Dibussi : Mis à part ses livres, est-ce que vous avez d’autres exemples à me citer ? Ces livres sont des exceptions. La France est un pays multiculturel avec notamment des personnes noires. C’est une identité qu’on ne peut pas effacer et qu’on ne doit pas mettre en opposition avec une identité française. Malgré sa publication en France, Aya de Yopougon est une bande dessinée qui a une identité ivoirienne revendiquée et ce n’est en rien choquant. C’est une histoire qui se passe en Afrique, précisément en Côte d’Ivoire. À un moment dans le livre, il y a des personnages qui viennent en France, mais c’est une histoire qui se passe principalement en Afrique. C’est un type de vécu. On ne peut pas sortir cet exemple à chaque fois pour parler de la représentation en bandes dessinées des personnes noires et des personnes afro descendantes françaises. C’est impossible, c’est ce qui crée les clichés. Il y aura une pluralité d’histoires quand il y aura une pluralité d’autrices et d’auteurs noirs. C’est aussi simple que ça. Quand je fais des formations, je demande toujours aux gens de me citer cinq bandes dessinées avec des personnages noirs. Les enfants se mettent aussitôt à citer des bandes dessinées américaines. Lorsque je précise ma requête en leur demandant de me citer des bandes dessinées françaises avec des personnages noirs, le nombre de répondants diminue. Et lorsque je leur demande de me citer des autrices et auteurs de bandes dessinées qui sont noirs, je me heurte souvent à un silence total… Pour qu’il y ait une empreinte, il faut qu’on puisse avoir des représentations de personnes noires qui soient plurielles, qui ne se limitent pas à Aya de Yopougon ou à Kirikou et Karaba. C’est cette pluralité de récits qui permettra d’éviter la présence de clichés en littérature. Il y a un travail à faire qui inclut tout le monde, tous les acteurs de la chaîne du livre.

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Avez-vous des préconisations concrètes pour remédier à ce problème ?

Reine Dibussi : Pour remédier à ce problème de représentation, il faudrait qu’on arrête de parler de la représentation comme d’un terme un peu fourre-tout. On parle de représentation parce que le problème de base, c’est le racisme. Et ce racisme se retrouve aussi dans la production de contenus culturels et donc en littérature. C’est vraiment de ça dont on parle. Je fais partie des personnes qui considèrent le racisme comme un problème de santé publique, qui a des effets sur les personnes qui le subissent. Le racisme a des effets sur notre santé mentale, sur nos vies, sur nos quotidiens. Il a des effets qui peuvent nous atteindre à court ou à long terme. Quand on parle de meilleures représentations, c’est le besoin simplement de déconstruire des images racistes et des modes de production de livres qui ont été faits dans un contexte raciste. Ensuite, de proposer des images plurielles afin que les personnes qui subissent ce racisme aient de meilleures représentations d’elles.

Visuellement, je m’inscris dans la proposition d’images qui font du bien, car je pense qu’il y a quelque chose de thérapeutique dans le fait de se voir représenter correctement, et donc, intégrer dans la société. C’est aussi pour ça que Quand vient l’été est une belle proposition comme Amours Croisés, la bande dessinée précédente de Laura Nsafou, qui est vraiment dans une logique de production de contenus respectueux des personnes et afroféministes. Son travail a une utilité importante : elle fait partie de ces courants littéraires et artistiques qui proposent aux personnes noires de meilleures représentations d’elles.

En collaboration avec la blogueuse et autrice Laura Nsafou, vous avez récemment publié Quand vient l’été, une bande dessinée à la fois sur le deuil, l’impossibilité du deuil et la culpabilité suite à la perte d’un être cher. Quelle est la genèse de ce livre ?

Reine Dibussi : C’est un projet de Laura Nsafou qui m’a proposé de l’illustrer. Comme c’est une autrice que je suivais depuis un moment et dont je connaissais les travaux, j’ai trouvé intéressant de participer au projet. Ce qui m’a surtout plu au début, c’est le fait que ce soit un récit qui explore l’histoire d’un personnage français noir avec un contexte familial. C’est quelque chose qu’on a rarement vu en bandes dessinées sauf à avoir une connaissance globale de la production actuelle. Ce qui n’est pas mon cas.

À travers le portrait de Rachel, le livre met notamment en exergue la difficile construction de soi dans la société lorsqu’on est une jeune femme noire et replète. Quelle en est la raison ?

Reine Dibussi : D’un point de vue graphique, je pensais dessiner, souvent, des femmes grosses en opposition aux corps qu’on m’avait appris à dessiner dans les écoles d’art. C’est-à-dire des corps squelettiques, maigres, valides et souvent torturés. Sauf que quand j’ai commencé à travailler sur ce projet, je me suis heurté au fait que je ne savais pas vraiment dessiner les corps gros alors que je suis moi-même grosse. J’ai dû faire un effort pour réapprendre à dessiner des corps gros, ronds. Il m’est arrivé de reprendre le dessin certaines fois lorsque Laura attirait mon attention sur le changement de morphologie de Rachel et le fait qu’elle soit plus mince sur certaines planches par rapport à d’autres alors qu’elle devait garder la même morphologie tout au long du livre. C’était important pour moi de déconstruire cela. En ce qui concerne les personnages noirs, je savais faire, j’en avais déjà dessiné. Il fallait simplement coller à la description que Laura avait choisie et qui permettait de comprendre le récit de Rachel, ce qu’elle traversait, ce qu’elle ressentait, ce à quoi elle se confrontait par rapport à sa rondeur, à sa carnation. C’était un très beau challenge que j’ai bien vécu.

Outre les sujets mis en exergue dans le livre, la singularité de ce livre se situe dans vos choix esthétiques. Vous optez notamment pour des techniques de dessin et de mises en couleur qui permettent de rompre avec les représentations maladroites et stéréotypées des personnes noires dans la bande dessinée. Est-ce un choix fortuit ou délibéré ?

Reine Dibussi : C’est un choix délibéré qui a surpris les éditeurs, mais sur lequel Laura m’a fait confiance. Quand j’aborde chaque projet, je l’aborde en regardant ce qu’il m’évoque, ce qu’il suscite chez moi en termes d’émotion. Je fais partie de ces artistes qui n’ont pas une main d’écriture fixe et qui se permettent différentes mains d’écriture. Pour ce projet, j’ai tenu à rester dans un style semi-réaliste au niveau du dessin et de la représentation des corps parce que quand on lit l’histoire des représentations des corps noirs en bandes dessinées, on constate que certains auteurs ont souvent été dans la caricature, dans les exagérations racistes, que ce soit volontairement ou involontairement. C’est vraiment ce qu’on a au niveau de la représentation des corps et imaginaires noirs. Très souvent ce que certains lecteurs, concernés par ce genre de représentation, recherchent en dessin et ce n’est pas un hasard, c’est souvent du semi-réalisme, voire de l’hyperréalisme puisque ces propositions sont un peu plus respectueuses de leurs identités.

Pour les couleurs, le choix a été motivé par l’émotion que j’ai ressentie à la lecture du scénario de Laura Nsafou. Je voulais quelque chose de poétique, de sensible qui aille bien avec l’exploration des sentiments de Rachel. Même si j’ai tendance à opter pour le réalisme dans la mise en couleurs de mes bandes dessinées, je ne voulais pas de couleurs réalistes pour ce livre, je tenais à avoir des couleurs qui évoquent de la nostalgie, de la poésie. C’est un texte avec beaucoup de silences et un rythme particulier. Je voulais que les couleurs suivent aussi ce rythme comme moi, je les ai ressenties. Il fallait qu’on sente aussi les évolutions des différents personnages.

La réalisation de ce livre semble vous avoir également permis de repenser la représentation des hommes noirs, souvent dépeints avec une insensibilité, une hypersexualisation, une sauvagerie…

Reine Dibussi : Ça, c’est clairement une démarche volontaire à travers justement le personnage de Joaquim. Laura m’a fait réfléchir à la représentation de sa masculinité dès le début du projet. Et c’est vrai que lorsque je dessinais, je ne pouvais m’empêcher de penser à toute cette série de représentations sur les hommes noirs qu’il y a eu dans la bande dessinée. J’avais une responsabilité vraiment importante. La représentation des corps et imaginaires noirs est un sujet dont on parle beaucoup dans le cinéma en ce moment. C’est tout aussi important en bandes dessinées. Le personnage de Joaquim est un personnage avec beaucoup de couches, de complexités qui n’enlèvent rien au fait qu’il soit sensible. Il fallait vraiment faire ressortir cette sensibilité dans son corps.

Ce livre m’a également permis de me confronter à un manque. Parce que quand on doit dessiner quelque chose qu’on n’a pas vu ou dont on n’a pas assez accès, c’est compliqué. Par exemple, lorsque j’ai commencé à faire des recherches pour pouvoir dessiner des scènes d’amour ou des scènes dans lesquelles on voyait des couples noirs enlacés, je tombais soit sur des images très pudiques ou ces derniers se touchaient à peine la main, soit sur des images sexuelles très animalisées, qui renvoyaient à la bestialité. Proposer quelque chose de différent était un exercice intéressant. En soi, la sensibilité de Joaquim n’est en rien extraordinaire, c’est simplement quelque chose qu’on ne voit pas assez en bandes dessinées. Joaquim ressemble à beaucoup d’hommes que je connais, qui sont proches de moi et qui sont sensibles et dont on voit la sensibilité dans le trait physique. C’est-à-dire dans les gestes.

Ce travail de déconstruction des stéréotypes n’est guère inédit dans votre œuvre. Les deux premiers tomes de la série Mulatako en font éminemment monstration. Quelle en est la raison ?

Reine Dibussi : Ça s’inscrit dans la même logique avec cette fois-ci un engagement féministe, qui consiste à proposer d’autres représentations de femmes noires en images. Comme je le disais plus tôt, la plupart des sujets sociaux dont on parle actuellement se retrouvent aussi en arts. Ils doivent être déconstruits pour que les gens puissent se retrouver dans les représentations. Ce que demande le public est très simple : questionner les représentations problématiques afin d’avoir de meilleures représentations. Je m’inscris dans cette logique.

Réalisée avec la scénariste Carine Bahanag, Mulatako est une formidable cartographie de plusieurs mythes précoloniaux africains. Comment cette bande dessinée a-t-elle été accueillie par le lectorat ?

Reine Dibussi : C’est vrai qu’au début quand je parlais de Mulatako, je parlais de mythes précoloniaux, mais en réalité, il s’agit de croyances qui sont encore pratiquées. Par exemple, le culte des esprits de l’eau est une croyance qui a perduré au Cameroun comme dans plusieurs autres cultures africaines et caribéennes. Tous les ans, au Cameroun, il y a le Ngondo, une fête où se retrouvent tous les peuples Sawa du pays pour célébrer les esprits de l’eau… Pour ce qui est de l’accueil du livre, les deux tomes de Mulatako ont été bien accueillis au Cameroun comme en France aussi. C’est une bonne réception qui nous encourage à aller au bout du projet.

Mulatako et Quand vient l’été sont des bandes dessinées réalisées en collaboration avec des scénaristes. Comment travaille-t-on à plusieurs mains sur un livre de bandes dessinées ? Comment parvenez-vous à traduire adéquatement en dessins les idées de vos collaboratrices ?

Reine Dibussi : Tout dépend du contrat de base. Mulatako est un projet que j’ai commencé seule. Dès le début, j’avais prévu que ce serait une série en quatre tomes. La trame initiale était donc déjà écrite. Quand elle intègre le projet à partir du tome deux en tant que scénariste, Carine Bahanag retravaille la trame, l’affine. Elle se retrouve aussi à la création du scénario des tomes trois et quatre. Cela signifie que je dois me coller à son rythme pour la suite du projet et inversement. C’est quelque chose qui n’est pas évident, mais qui s’apprend. Pour Quand vient l’été, j’ai été contacté par Laura Nsafou pour intégrer le projet en tant qu’illustratrice. La collaboration s’est très bien passée, car elle est à l’écoute et dans un dialogue constructif qui laisse de la place au dessinateur. On a eu beaucoup d’échanges sur certaines propositions que j’avais faites. Par exemple, elle avait vraiment aimé une image que j’avais réalisée et publiée sur les réseaux sociaux et m’a dit qu’elle voudrait bien que le livre soit fait dans ce style. Ce que j’en ai compris, c’est que c’était la couleur qui lui avait plu. Je suis allée dans une proposition de mise en couleur qu’elle a su apprécier. C’était une vraie collaboration à quatre mains.

Pour le projet d’Anlu la BD, on a fait un live pour discuter de tous les aspects auxquels il faut penser dans le cadre d’une collaboration telles que la répartition du travail, l’importance d’être à l’écoute, de s’adapter au rythme des collaboratrices, de se fixer des limites et d’entendre ceux des autres… Pour ce genre de projet rarement financé avant la création de l’œuvre finale, il faut tout définir dans le contrat de base pour bien cadrer la collaboration.

Quels sont les textes et auteurs qui vous ont permis de vous construire intellectuellement et humainement ?

Reine Dibussi : Je dirai Toni Morrison ! Outre la poésie et la musicalité de son écriture, j’aime beaucoup la façon dont elle représente les femmes, dont elle décrit leur complexité, leur relation et complicité entre elles. C’est quelque chose qui m’a beaucoup marqué plus que l’ancrage culturel afro-américain. Il y a aussi Amandine Gay, la réalisatrice d’Ouvrir la voix. C’est une autrice que j’aime bien et dont j’ai surtout consommé la filmographie. Une histoire à soi, son dernier film documentaire sur le parcours des adoptés transnationaux m’a beaucoup plu. Ce que j’aime dans son œuvre, c’est le lien entre les positionnements politiques et la création de l’œuvre artistique. Il n’y a pas de rupture : on voit automatiquement le trait d’union. Ce positionnement est quelque chose qui fait sens pour moi.

Pour mes références graphiques, je cite souvent des artistes contemporains que j’aime beaucoup comme Sergio Toppi, scénariste et dessinateur de bandes dessinées italien et Nesskain, un illustrateur et concept artiste français qui travaille dans le jeu vidéo. Le travail de Christophe Chabouté me plaît beaucoup ! Ses bandes dessinées en noir et blanc sont vraiment impressionnantes. Franchement, je suis comme une éponge, je vois de la valeur dans beaucoup d’œuvres artistiques.

Vous avez en commun avec Christophe Chabouté de proposer des représentations minutieuses qui permettent souvent de reconnaître instamment les lieux où se déroulent les différentes intrigues du livre. La ville de Paris est d’ailleurs particulièrement bien dessinée dans Quand vient l’été.

Reine Dibussi : En bandes dessinées, l’une de mes bêtes noires, ce sont les décors. Je travaille toujours d’après des références comme les photos que je prends. Comme je suis dans un univers semi-réaliste, il était important qu’on sache qu’on est à Paris. Pour cela, il fallait mettre des décors facilement reconnaissables. Cet encrage culturel aide aussi à mieux comprendre les personnages et la façon dont ils agissent face à certaines situations.

Comment qualifierez-vous votre travail ?

Reine Dibussi : Changeante, libre, semi-réaliste et afroféministe.

Avez-vous d’autres projets en perspective ?

Reine Dibussi : Oui, il y a Anlu la bande dessinée, un projet historique et féministe inspiré de la thèse de Rose Ndengue, historienne et socio-politiste. Nous sommes quatre autrices sur le projet. Il y a mes projets personnels en tant qu’artiste indépendante qui propose des œuvres afro queers en bandes dessinées. En dernier, il y a les formations que nous donnons à des auteurs et autrices de bandes dessinées à travers Afiri Studio, notre studio graphique et maison d’édition indépendante. On les accompagne sur un projet concret allant de l’écriture du scénario à la réalisation des planches. Le but, c’est de mettre en avant la littérature africaine francophone, ce qui veut dire qu’il y aura des collaborations avec des auteurs et autrices d’Afrique francophone, d’Afrique centrale, des caraïbes, d’Europe de l’Ouest… C’est un projet qu’on a mis en place et que je pilote.

Un dernier mot sur la bande dessinée ? Que peut-elle ?

Reine Dibussi : La bande dessinée peut corriger. Elle peut guérir et surtout faire rêver.